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Contes et légendes du Québec et de l’Amérique française : deux publications

Contes et légendes du Québec et de l’Amérique française :
deux publications

 
par Gilles Durand

 

Deux publications, parues récemment en 2008, permettent d’apprivoiser davantage l’univers des contes et des légendes du Québec et de l’Amérique française, une littérature orale d’origine française, d’abord transmise de bouche à oreille et riche de repères de mémoire communs aux Québécois et aux Français.

 

Légendes de l’Amérique française

Le premier ouvrage, titré Légendes de l’Amérique française, une plaquette qui a pour auteur Jean-Claude Dupont (Sainte-Foy, Québec, Éditions J.-C. Dupont, 66 pages), met en valeur 25 légendes, accompagnées d’illustrations suggestives, recueillies aux quatre coins de l’Amérique française. La Commission franco-québécoise sur les lieux de mémoire communs a apporté son support à la publication de ce recueil. Celui-ci reprend le contenu d’une exposition déjà présentée et valorise par là une portion de notre patrimoine immatériel abondant, mais encore peu étudié. Les légendes recueillies partagent plusieurs caractéristiques en commun : l’emprunt à la mythologie, le culte du héros, le recours à des forces physiques et spirituelles. Par exemple, la chasse-galerie peut emprunter, comme véhicule de déplacement des voyageurs dans le firmament, le tronc d’arbre (Île-du-Prince-Édouard), le canot et, au 20e siècle, le train, l’avion ou l’autobus sans toit (Massachusetts), mais toujours la fête est au rendez-vous et le moyen de transport sous l’emprise du sorcier. Par contre, les légendes diffèrent aussi en fonction de leur contexte historique et géographique. Elles sont autant diverses et variées que les groupes qui les construisent, portant par là la marque de particularités économiques et sociologiques.

En Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick, c’est l’époque du grand dérangement : une église abandonnée se prête au pillage, une population en marche vers une nouvelle terre d’accueil trouve miraculeusement de quoi se sustenter. Au Québec, la construction d’un pont pour enjamber une rivière, la recherche de bois de chauffage peut engendrer plus d’un conflit que le diable tente de solutionner. Au Manitoba, ce sont les grandes plaines qui facilitent la chevauchée du «°cheval blanc°». En Saskatchewan, les horizons sans fin des territoires de chasse provoquent l’isolement du trappeur et parfois une séparation définitive de sa fiancée. En Colombie-britannique, des navires d’un autre continent accostent sur la Côte du Pacifique, le marin français a parfois à faire face et à vaincre l’étranger. Du côté américain, dans le Michigan, dans le Vermont, c’est l’attrait des chantiers forestiers, l’occasion pour les Canadiens de faire des démonstrations de force.

 

« Le conte et la légende au Québec » dans Québec français, no 150, été 2008

Le deuxième ouvrage, le dernier numéro (150, été 2008) de la revue Québec français dirigée par Aurélien Boivin, a été consacré en partie au développement du thème du conte et de la légende au Québec. La coordonnatrice du dossier, Chantale Gingras, a su s’est entourer de collaboratrices et collaborateurs passionnés par leur métier, pour livrer des études dont l’ensemble forme une information abondante, riche et diversifiée sur le sujet. Carole Saulnier brosse l’historique des Archives de folklore et d’ethnologie de l’Université Laval, leur naissance sous l’impulsion de Luc Lacourcière, leur expansion à l’époque de la Révolution tranquille, leur contenu (contes, légendes, chansons, musique, entrevues sur les métiers, les costumes, etc.), les défis actuels occasionnés par le passage du support analogique au support numérique, leur clientèle qui ne se tarit jamais. Bertrand Bergeron présente les légendes au Saguenay – Lac-Saint-Jean, leurs particularités par rapport à d’autres régions, par exemple l’absence des diables constructeurs de ponts. Il aborde leur évolution dans le temps, les légendes abandonnant leur allure traditionnelle pour revêtir un caractère urbain, témoignant par là des nouvelles peurs et angoisses des collectivités qui les portent (présence de l’étranger, etc.). Geneviève Ouellet revient sur le lien entre le légendaire et la géographie, celle de la Côte-du-Sud port-jolienne, les légendes prenant racine en symbiose avec le fleuve, par exemple le phare du Pilier de Pierre mettant à l’épreuve l’endurance du gardien, la Coureuse des grèves à la recherche des marins qui viennent faire escale, ou bien encore la tempête balayant avec furie l’anse, où des riverains se sont réfugiés, avec ses conséquences désastreuses. Arleen Thibault et Chantale Gingras introduisent dans l’univers de la conteuse et du conteur, autant de calibre professionnel qu’amateur (ou qui se considère tel) : leurs sources d’inspiration, mémoires des anciens du village, bibliothèques, archives de folklore, corpus des contes et légendes du monde entier, réactions du public, mais aussi et beaucoup la part qui relève de leur créativité personnelle. De leur côté, Petronella van Dijk et Christian-Marie Pons traitent de la diffusion du conte et de la légende à travers ses lieux d’expression (festivals, soirées, cercles, etc.) et par le biais du monde de l’édition capable de concilier le support traditionnel avec la nouvelle technologie. Enfin, d’autres auteurs apportent leur contribution en traitant de l’imaginaire algonquien (Rémi Savard), de la relation conte-narrativité (Jennyfer Collin), du phénomène des contes urbains (leur mise en scène – Yvan Bienvenue) et de la production des maisons d’édition (Isabelle Péladeau).

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