L’hôtel du Parlement, mémoire du Québec
par Gaston Deschênes
L’hôtel du parlement, mémoire du Québec s’inscrit dans la lignée des ouvrages publiés par l’Assemblée nationale depuis le début des années 1970 pour mettre en valeur le pouvoir législatif et l’édifice qui le symbolise aux yeux des Québécois.
Auparavant, le Parlement laissait à l’exécutif le soin de faire la promotion de cet édifice qui était en majeure partie occupé par les ministères et qu’on avait rapidement pris l’habitude de désigner sous le nom d’« hôtel du gouvernement ». Le ministère des Travaux publics en assumait la gestion et c’est dans son rapport annuel que le premier texte substantiel sur cet édifice a été publié en 1897 par Ernest Gagnon, secrétaire du ministère. Ses « Notes sur la propriété de l’hôtel du Gouvernement à Québec » racontaient la brève histoire de l’édifice, décrivaient ses façades et sa décoration intérieure, la pose de la pierre angulaire, etc. La même année, Gagnon éditait son texte dans un ouvrage intitulé Le palais législatif de Québec/Government Buildings in Quebec1 qui a servi de référence pendant plusieurs décennies. Dans les années 1960, ce sont les services gouvernementaux responsables du tourisme qui ont repris l’essentiel du texte de Gagnon dans des brochures illustrées et intitulées L’hôtel du Gouvernement de la province de Québec.2
Au début des années 1970, le président de l’Assemblée nationale a pris plusieurs initiatives pour mieux faire connaître le Parlement. La panoplie des moyens mis en place sous la direction du président Lavoie comprenait la création du Bureau d’accueil et d’information, la réalisation d’un documentaire sur le Parlement, la constitution d’un musée malheureusement disparu une décennie plus tard. Mais avant tout, il avait fait rédiger L’Assemblée nationale du Québec par André Beaulieu, alors directeur adjoint de la Bibliothèque3, un ouvrage abondamment illustré qui décrivait le fonctionnement de l’Assemblée nationale et racontait brièvement l’histoire de son édifice. Devenu directeur du Bureau d’accueil et d’information, André Beaulieu revenait quelques années plus tard avec un autre ouvrage, L’hôtel du Parlement, qui s’intéressait cette fois essentiellement au bâtiment et à sa décoration4.
Les ouvrages de cette époque s’inspiraient encore largement des textes d’Ernest Gagnon, mais entre-temps, à l’université comme à l’Assemblée nationale, les recherches historiques permettaient désormais de renouveler le matériel d’information du Parlement. C’est ainsi qu’on a pu éditer en 1986 un ouvrage5 substantiel, L’hôtel du Parlement, témoin de notre histoire. Ce livre abondamment illustré traitait, dans des proportions à peu près égales, de l’histoire de l’institution (le Parlement) depuis 1792 et de l’histoire de l’édifice (désigné officiellement comme « l’hôtel du Parlement » en 1980).
Vingt ans plus tard, cet ouvrage gardait sa valeur comme ouvrage de référence sur l’histoire de l’hôtel du Parlement mais il avait fait son temps comme « carte de visite » et livre-cadeau. L’Assemblée nationale a donc décidé en 2005 de confier à Stromboli, une maison spécialisée dans la production d’ouvrages de prestige, la réalisation d’un nouveau livre6 qui a été lancé en décembre 2007, après deux ans de travail.
Je ne pouvais refuser l’offre que Francesco Bellomo m’a faite en 2005 parce que j’avais le concept de ce livre en tête depuis plusieurs années. Il a pris forme au moment où je me suis intéressé à la signification de la devise du Québec.
L’architecte Eugène-Étienne Taché a résumé en ces trois mots, Je me souviens, le message qu’il avait en tête en dressant les plans de l’hôtel du Parlement. Cette devise prend tout son sens lorsqu’on peut la lire sur la façade de l’hôtel du Parlement, au-dessus de la porte principale, là où elle est apparue pour la première fois. Dans la pierre, le bois et le plâtre, Taché a voulu rappeler à ses compatriotes les grandes pages de leur histoire et les principaux symboles de leur identité. Il a joué un rôle déterminant dans le choix des personnages dont le souvenir est immortalisé par des statues et des armoiries. Les éléments décoratifs qu’il a choisis rappellent en particulier les liens qui ont successivement rattaché le Québec à deux métropoles et à un ensemble confédératif. À l’intérieur, il a réservé des surfaces pour les tableaux d’histoire que réalisera plus tard Charles Huot et prévu des niches pour des bustes ou des statues. Ses successeurs ont naturellement poursuivi son projet en meublant les piédestaux de la façade, en élevant des monuments dans les jardins, en installant des vitraux commémoratifs, en créant une galerie de portraits. L’hôtel du Parlement est devenu un livre ouvert sur l’histoire du Québec.
Francesco Bellomo s’est approprié cette idée avec son œil de photographe et son flair d’éditeur. Il s’est entouré d’une équipe de graphistes qui l’a interprétée à sa façon et rehaussée, de la même manière qu’on colore des illustrations en noir et blanc pour leur donner un nouveau lustre. Le résultat est conforme à l’idée de départ mais très différent de ce que j’avais imaginé. Chacune des doubles pages de ce livre est une « scénarisation » nouvelle, un travail de création qui surprend parfois.
L’hôtel du parlement, mémoire du Québec se distingue des ouvrages précédents qui ont décrit l’édifice, analysé ses caractéristiques et rappelé son histoire. Il ne s’agit pas d’un traité d’architecture ni d’un catalogue des biens patrimoniaux mais d’un « guide » pour lire l’histoire du Québec dans l’hôtel du Parlement, son architecture et ses éléments décoratifs, ses monuments et ses œuvres d’art, mais aussi ses livres anciens et ses archives.
L’hôtel du Parlement, mémoire du Québec offre en quelque sorte une histoire illustrée du Québec, des origines à la fin du XXe siècle, en dix chapitres : 1534 – La rencontre de deux mondes ; 1663 – Une province française aux dimensions d’un empire ; 1763 – D’une métropole à l’autre ; 1792 – Les premières institutions parlementaires ; 1837 – Résolutions, rébellions, réformes ; 1867 – Le Québec dans la confédération ; 1887 – Le Parlement dans son palais ; 1900 – À la recherche de la modernité ; 1944 – Westminster-sur-le-Saint-Laurent ; 1960 – Révolution tranquille et réforme parlementaire.
Les lecteurs qui ont déjà une idée de cette histoire n’auront qu’à regarder les photographies de Francesco Bellomo (plus de 350) et lire les bas de vignette pour en retrouver les grandes lignes ; la brève synthèse d’histoire du Québec qui donne une structure à l’ouvrage aidera les autres à replacer les personnages et les événements dans leur contexte.
Vous trouverez les informations pour vous procurer cet ouvrage dans le site de l’Assemblée nationale.
1 – GAGNON, Ernest, Le palais législatif de Québec/Government Buildings in Quebec, Québec, C. Darveau, 1897, 137 p. [Retour au texte]
2 – L’Hôtel du Gouvernement de la province de Québec / édité par le Service du tourisme de la province de Québec, Québec, Le Service, [1962?], 24 p., ill. L’Hôtel du gouvernement de la province de Québec/ The Parliament buildings of « la province de Québec », Québec, Direction générale du tourisme, [1967], 36 p., ill. L’Hôtel du gouvernement de la province de Québec / The Parliament buildings of « la province de Québec », [Québec], Ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, [1965?], 36 p., ill. [Retour au texte]
3 – BEAULIEU, André, L’Assemblée nationale du Québec, Québec, Éditeur officiel du Québec, 1973, 69 p. (« La documentation québécoise »). En anglais : The Quebec National Assembly, Québec, Éditeur officiel du Québec, 1973, 69 p. [Retour au texte]
4 – BEAULIEU, André, L’Hôtel du Parlement, Québec, Assemblée nationale, 1981, 96 p. [Retour au texte]
5 – NOPPEN, Luc et Gaston DESCHÊNES, L’Hôtel du Parlement, témoin de notre histoire, Québec, Les Publications du Québec, 1986, ix, 204 p. [Retour au texte]
6 – DESCHÊNES, Gaston et Francesco BELLOMO, L’hôtel du Parlement, mémoire du Québec, Saint-Lambert, Stromboli, 2007, 264 p. [Retour au texte]