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Les morts de la Guerre de Sept Ans au Cimetière de l’Hôpital-Général de Québec

Les morts de la guerre de Sept Ans au cimetière
de l’Hôpital-Général de Québec

Le 11 octobre 2001, par une splendide journée, une émouvante cérémonie commémorative s’est déroulée au cimetière de l’Hôpital-Général de Québec, situé face au monastère des Augustines dans le quartier Saint-Roch, à Québec. Il s’agit de l’endroit où furent inhumés les soldats de l’armée de Montcalm et de Wolfe morts de maladie ou des suites de blessures reçues lors de la guerre de Sept Ans. Ce lieu avait complètement disparu de notre mémoire collective. Pendant 240 ans, les Augustines de l’Hôpital Général de Québec ont préservé, dans l’indifférence générale et l’anonymat absolu, ce petit cimetière privé. Elles ont aussi conservé pour les générations futures les fameux registres mortuaires.

Ces cérémonies, initiatives de la Commission de la capitale nationale (CCNQ) du ministère de la Culture et des Communications (MCC) et du Souvenir Français1, ont réuni le premier ministre du Québec de l’époque, monsieur Bernard Landry, accompagné des ministres Louise Beaudoin (Relations Internationales) et Diane Lemieux (Culture et Communications). Parmi les autres dignitaires, se trouvaient l’évêque de Québec, Mgr Maurice Couture, les consuls généraux de France et de Grande-Bretagne, le délégué général du Souvenir Français au Canada, monsieur Jean Bodo, le maire de Québec d’alors, monsieur Jean-Paul L’Allier, ainsi que la comtesse Robert de Montcalm et son fils, le marquis Guy Bertrand de Montcalm, descendants de l’illustre personnage.

 

 

LES CÉRÉMONIES

Les cérémonies se sont déroulées en deux temps :

1- La translation des restes de Louis-Joseph marquis de Montcalm dans un mausolée spécialement aménagé.

Montcalm, mortellement blessé à la bataille des plaines d’Abraham, est mort le lendemain et fut inhumé dans la chapelle des Ursulines à Québec. Après les prières d’usage par Mgr Couture dans la chapelle des Ursulines, rue Donnacona, le cercueil de Montcalm, recouvert du drapeau blanc à fleurdelisés dorés de la monarchie française, a été placé sur un chariot funéraire tiré par quatre magnifiques percherons noirs. Le convoi funèbre semblable à ceux du XVIIIe siècle, s’est ébranlé à seize heures et s’est dirigé vers le cimetière de l’Hôpital-Général de Québec au son du fifre et du tambour, à la grande surprise des milliers de spectateurs sur les trottoirs.

Les drapeaux des régiments de Montcalm battaient fièrement au vent. Des reconstitueurs historiques représentant les régiments de Montcalm, les miliciens canadiens et la population de Nouvelle-France, recréaient l’atmosphère de l’époque. Même les Ursulines, les Augustines et l’évêque de Québec avaient revêtu leurs costumes traditionnels. La dépouille de Montcalm, flanquée de sa garde d’honneur (dix soldats des Compagnies franches de la marine), arriva au cimetière au son de la musique de circonstance du Royal 22e Régiment. L’émotion atteignit son sommet alors que plusieurs personnes pleuraient en silence. Après les mots d’usage de la ministre des Relations internationales et du Délégué général du Souvenir Français, les restes de Montcalm ont alors été placés dans un sarcophage à l’intérieur du mausolée. Il fallut 242 ans pour que le lieutenant général soit à nouveau réuni avec ses soldats.

2- L’inauguration du Mémorial de la guerre de Sept Ans.

 

morts

Le mémorial
de la guerre de Sept
Ans – Hôpital-Général
de Québec
Crédit

Les noms de plus d’un millier de soldats, marins et miliciens inhumés ici, sont inscrits sur le mémorial et classés par régiment selon les années de la guerre de 1755 à 1760. Cependant, dans le cimetière, les troupes françaises comprenant les miliciens canadiens sont au nombre d’au moins 1 237 dont 1 025 officiers et soldats ont été enregistrés (1 058 avec les Anglais). La différence fait état de soldats inconnus des batailles des plaines d’Abraham et de Sainte-Foy. Le tumulte et l’affluence des blessés et des mourants suivant ces batailles n’ont pas permis l’enregistrement de tout le monde; à défaut, les religieuses les ont comptés. La majorité des inconnus sont des miliciens et des Amérindiens.

Les troupes de Wolfe et de Murray inhumées par les Augustines reposent également en grand nombre dans ce cimetière et aux alentours. Dans leurs Annales, les religieuses nous indiquent qu’elles ont inhumé collectivement des centaines de soldats britanniques de 1759-1760 dans de larges fosses à quelques dizaines de pieds au nord-est et à l’est de l’enceinte du cimetière. Cependant, jusqu’à présent, nous ne connaissons ni leur nombre exact, ni leurs noms. Les Augustines ont cessé d’enregistrer le décès des Anglais à partir de l’arrivée de la flotte de Wolfe devant Québec, le 27 juin 1759. Nous possédons par contre les noms des prisonniers anglais qui décédèrent à l’Hôpital Général entre 1755 et 1758.

Par la suite, la ministre de la Culture et des Communications, procéda au dévoilement de la magnifique sculpture qui rehausse le mémorial. Le Mémorial des morts de la guerre de Sept Ans fut inauguré par le premier ministre qui, devoir de mémoire oblige, prononça un poignant discours. Son discours fut suivi par une allocution du consul général de France, M. Jacques Audibert, rendant l’hommage de la France aux défenseurs de Québec.

Clôturant les cérémonies, M. Marcel Robidas, ex-maire de Longueuil et vétéran de la bataille de Normandie (1944) lut avec émotion l’Acte du Souvenir suivant : « Officiers aristocrates et humbles soldats, marins et miliciens, vous reposez ici côte à côte, sans distinction. Jeunes gens moissonnés par la guerre, vous avez vécu en Nouvelle-France l’aventure de votre vie en défendant votre patrie. Vos noms désormais immortalisés dans la pierre, notre mémoire ne faillira plus. Nous nous souviendrons de vous ». 2

CARACTÉRISTIQUES DU CIMETIÈRE HGQ

Vitrine de l’histoire militaire québécoise du XVIIIe siècle, en voici les principales caractéristiques :

1– Il s’agit du seul cimetière dans le monde qui témoigne de la guerre de Sept Ans (les autres ont disparu), la véritable première guerre mondiale de l’humanité avec ses 550 000 morts. Les combats se sont déroulés sur quatre continents, de la Baltique à la Méditerranée, de la Manche à la Russie, aux Antilles, sur la côte africaine (bataille de Lagos), dans les lointains comptoirs commerciaux des Indes, aux Philippines et bien entendu en Amérique du Nord.

Cette guerre met en scène la France et ses alliés, l’Autriche, la Russie, la Suède et l’Espagne (à partir de 1761), en opposition à l’Angleterre, le Royaume de Hanovre, la Prusse et le Portugal (à partir de 1762).

2– Le cimetière HGQ renferme dans ses entrailles la plus importante concentration connue de chevaliers de l’Ordre royal et militaire de Saint-Louis au monde : 18 chevaliers avec Montcalm.

3- Le cimetière HGQ est le plus ancien cimetière de Québec encore visible. Ouvert en 1710, il est de petite dimension soit 150 pi. X 250 pi. (45 m X 76 m).

4- L’enregistrement des morts de guerre, la conservation des registres mortuaires et la préservation perpétuelle du site de leur sépulture par les Augustines, furent une première dans l’histoire de l’humanité. Il faudra attendre à la fin de la Première Guerre mondiale (1914-1918) pour que systématiquement les morts de guerre soient commémorés individuellement.

5- La dimension internationale du cimetière inscrite sur le Mémorial aux morts de la guerre de Sept ans : soldats et marins français, miliciens canadiens, alliés amérindiens, soldats britanniques, écossais et miliciens anglo-américains (en nombre indéterminé).

6- Ses principaux éléments en font un cimetière-musée :

le Mausolée de Montcalm;

le Mémorial de la guerre de Sept Ans;

la magnifique sculpture de Pascale Archambault Traversée sans retour évoquant le destin tragique de ces soldats et symbolisant l’entraide et le réconfort dans le malheur partagé;

ses panneaux d’interprétations historiques;

ses plaques commémoratives;

son aménagement paysager et ses vieilles stèles créant un îlot champêtre au cœur d’un quartier ouvrier (St-Roch);

sur le plan pédagogique, un ouvrage de référence relate son histoire et ses locataires perpétuels : Les morts de la guerre de Sept Ans au Cimetière de l’Hôpital-Général de Québec, par Jean-Yves Bronze, publié par Les Presses de l’Université Laval, Québec, 2001, 190 p.

7– Sa composante commémorative fait que des cérémonies s’y tiennent régulièrement, le lieu étant rattaché à des anniversaires et à des personnages historiques.

8– L’endroit est classé par la Commission des biens culturels du Québec (CBC). Par ailleurs, le cimetière HGQ a été reconnu « Lieu historique national » en 1999 par le gouvernement fédéral (Commission des lieux et monuments historiques du Canada) et officialisé le 14 septembre 2005 par

Lorsque vous irez à Québec cet été, prenez le temps de visiter le Ccimetière de l’Hôpital-Général de Québec, question d’apprécier par vous-même la beauté du site; il est situé au 260, boulevard Langelier. Puisque vous êtes sur place, profitez-en pour voir la chapelle du monastère (tombeau de Mgr de Saint-Vallier) ainsi que les collections uniques du musée des Augustines datant de l’époque de la Nouvelle-France.
Dans le cimetière, ayez conscience que vous déambulez au-dessus des restes des valeureux combattants des batailles des plaines d’Abraham, de Sainte-Foy et du siège de Québec. Ici, officiers aristocrates et simples soldats du Roi reposent côte à côte. 3

Cimetière de l’Hôpital-Général de Québec

Classification des morts identifiés de la guerre de Sept Ans. 1755-1760
Ó bataille des plaines d’Abraham, 13 septembre 1759.
† bataille de Sainte-Foy, 28 avril 1760.
? nombre incertain

 

 

Régiments

Officiers

Hommes

Total

Ó

 

 

 

 

 

 

Béarn

5

29

34

7

20

 

 

 

 

 

 

Berry

7

217

224

46

 

 

 

 

 

 

Guyenne

5

43

48

10

13

 

 

 

 

 

 

Languedoc

2

40

42

9

7

 

 

 

 

 

 

La Reine

1

38

39

7

 

 

 

 

 

 

La Sarre

5

42

47

11

16

 

 

 

 

 

 

Royal Artillerie

6

6

1

 

 

 

 

 

 

Royal-Roussillon

1

38

39

3

20

 

 

 

 

 

 

Compagnies franches

de la Marine

6

06

112

4

25

 

 

 

 

 

 

Marine française

7

290

297

9

1

 

 

 

 

 

 

Miliciens canadiens

4

88

92

37

19

 

 

 

 

 

 

Autres régiments

5

5

 

 

 

 

 

 

Régiments non identifiés

1

34

35

 

 

 

 

 

 

Soldats anonymes

5

5 + ?

?

2 +?

 

 

 

 

 

 

Sous-total

44

981

1 025 +?

100 +?

177 +?

 

 

 

 

 

 

Britanniques

2

31

33 +?

?

?

 

 

 

 

 

 

Total

46

1 012

1 058 +?

 

100 +?

177 +?

© Jean-Yves Bronze 2001

 

  1. Le Souvenir Français est un organisme privé né en 1872 après la guerre franco-prussienne en Alsace et en Lorraine occupée et fondée officiellement en 1887. Placé sous le haut patronage du président de la République, le Souvenir Français a pour mission de conserver la mémoire de tous ceux qui sont morts pour la France, peu importe le lieu ou l’époque. C’est lui qui veille et qui participe à l’entretien de leurs tombes (3 000 carrés militaires) ainsi que des monuments élevés à leur gloire, visibles dans toutes les communes de France. Observant la plus stricte neutralité politique, confessionnelle ou philosophique, Le Souvenir Français a pour devise À nous le Souvenir. À eux l’éternité! Site web : www.souvenir-francais.com
  2. Les cérémonies commémoratives militaires ont l’habitude de se terminer par l’Acte du Souvenir lequel est lu par un ancien combattant. Ce petit texte composé par Jean-Yves Bronze, constitue l’Acte du Souvenir officiel du cimetière de l’Hôpital- Général de Québec. © Jean-Yves Bronze, 2001
  3. On trouvera des photos du cimetière, du Mémorial de la guerre de Sept Ans et du Mausolée de Montcalm sur le site de la Commission de la capitale nationale du Québec : http://www.capitale.gouv.qc.ca/souvenir/monuments/guerre.html

 

Crédit: http://www.capitale.gouv.qc.ca/souvenir/monuments/guerre.html
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