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À l’occasion du 250e anniversaire de la signature du traité de Paris le 10 février 1763, l’éditeur Septentrion lance une publication sur le sujet

Par Gilles Durand

1763. Le traité de Paris bouleverse l'Amérique.

1763. Le traité de Paris bouleverse l’Amérique

À l’occasion du 250e anniversaire de la signature du traité de Paris, le 10 février 1763, qui transfère la Nouvelle-France à l’empire britannique, l’éditeur Septentrion fait le point sur des questions soulevées dans le cadre d’activités de commémoration, soit des conférences et colloques tenus au Québec et à Paris en 2013. Dans un ouvrage de 456 pages richement illustré, ayant pour titre 1763 Le traité de Paris bouleverse l’Amérique, 17 spécialistes nous entretiennent de cette paix considérée « ni bonne ny glorieuse », sous la codirection de Sophie Imbeault, Denis Vaugeois et Laurent Veyssière.

Le contenu de l’ouvrage
Précédée d’une introduction livrant une vision d’ensemble d’un conflit mettant en cause à la fois la France continentale et coloniale, la publication se divise en trois grandes parties. La première, « Avant le traité de Paris » – 7 textes –, brosse un portrait de la société et de l’économie de la Nouvelle-France : caractères originaux des Canadiens, exploitation des matières premières et commerce triangulaire entre la métropole et ses colonies, alliances avec les Amérindiens, contexte international de la guerre de Sept Ans. La deuxième partie, « Le traité de Paris » – 6 textes –, fait le point sur le traité de paix et ses « non-dits » : sort réservé aux détenteurs de la monnaie de papier, arrivées dans la colonie et départs de celle-ci, accueil et place faits par la mère patrie à ceux qui retournent, vision de l’entente par les métropolitains. La dernière partie, « Après le traité de Paris » – 9 textes –, entrouvre la porte sur les suites du traité pour les Canadiens demeurés au pays : participation à l’administration coloniale et à la vie économique, contacts entre l’ancienne métropole et sa colonie de même qu’entre ceux qui restent et les nouveaux venus anglophones, système de concession des terres, pratiques alimentaires et culturelles, exercice du culte, interprétations données à la Conquête dans le long terme. Pour conclure, les principaux éléments ayant joué lors de la signature de l’entente de paix sont mis dans la balance. Suivent en fin d’ouvrage une chronologie des événements et un index des noms de personnes – incluant quelques noms de lieux et sujets de première importance, tels « Abandon, Indiens alliés des Français, Papier du Canada, Pays d’en Haut, etc. » – permettant aux lecteurs de garder le cap sur le sujet à l’étude et de revenir plus facilement sur des points de vue déjà exprimés.

Quelques questions débattues dans la publication
Les choix de la France lors des négociations

Lors des négociations, la France n’a plus de marge de manœuvre tant au niveau de ses ressources financières que de sa marine de guerre, sans compter une colonie très peu populeuse face aux Treize Colonies britanniques et constituant par là un marché secondaire. Nulle surprise qu’elle accorde la priorité aux droits de pêche et de séchage du poisson dans le golfe Saint-Laurent et aux îles à sucre antillaises. D’un côté, le poisson nourrit les Européens tout en assurant aux pêcheurs, commerçants, armateurs et intermédiaires des profits. La royauté y voit de son côté une source de revenus et l’assurance d’une relève de sa marine de guerre, mise à mal par les Britanniques au cours du dernier conflit. De l’autre, le sucre, une denrée très en demande sur les marchés européens, constitue une source de richesse très importante pour ceux qui sont impliqués dans sa production et sa commercialisation. Les fourrures, quant à elles, n’occupent plus la position enviable des premiers temps de la colonie. Si leur commerce a suscité des activités d’expansion sur le continent nord-américain avec le partenariat des Amérindiens, elles sont appelées à être déclassées par l’exploitation du bois et la colonisation du territoire.

 

Cession de territoire, abandon des Canadiens et des Amérindiens
Des reproches sont adressés à la France pour avoir cédé trop facilement la Nouvelle-France aux Britanniques. La métropole est taxée d’indifférence, plusieurs partagent le sentiment d’avoir été abandonnés. À preuve, dira-t-on, les pertes occasionnées aux détenteurs de monnaie de papier, l’accueil plus que tiède et les possibilités de carrière très limitées pour ceux qui retournent dans la mère patrie.

La métropole française a-t-elle vraiment le choix de cette cession pouvant être qualifiée de « consentie mais non souhaitée (p. 28) »? La priorité donnée aux droits de pêche en bordure du continent nord-américain n’implique pas nécessairement sa cession complète. De leur côté, les îles sucrières peuvent être vues comme un gain facile : les planteurs britanniques font des pressions auprès de Londres pour ne pas inclure dans l’empire de nouvelles îles antillaises dont la production de sucre viendrait concurrencer la leur.

L’abandon de la vallée du Saint-Laurent et de l’intérieur du continent ne se produit qu’après un effort de guerre acharné, sans compter la contribution importante au peuplement de la colonie des soldats venus combattre. D’ailleurs, Louis XV reconnaît lui-même que la paix de 1763 n’est « ni bonne ny glorieuse » et qu’il vise à éviter le pire en arrêtant la guerre et en signant la paix. Ce n’est pas par hasard que les fêtes qu’il fait organiser en juin 1763 pour faire connaître au grand public le traité, visent tout autant l’inauguration d’une statue équestre à son image que l’entente mettant fin aux hostilités. Les Français, eux, célèbrent bien davantage la fin d’un conflit coûteux en hommes et le retour à une vie normale que la brisure de la chaîne qui les relie à leurs descendants en terre d’Amérique.

Quant aux Amérindiens domiciliés de la vallée du Saint-Laurent, ils ont déjà changé de camp à la signature du traité de paix. Face à leurs anciens alliés français qui accumulent les défaites, ils optent pour la neutralité puis pour la collaboration avec les Britanniques contre leurs semblables du Pays d’en Haut et du Mississippi, en échange de la protection de leurs droits. Malheureusement, faute de précisions sur leurs droits, ils se retrouvent malgré eux usufruitiers du territoire plutôt que propriétaires.

Pour en savoir davantage
Les différentes études dont se compose la publication constituent un apport incontournable à une bonne connaissance des tenants et aboutissants du traité. Leur lecture stimule pour découvrir, au besoin pour redécouvrir des événements importants de notre histoire, de même qu’elle est source d’inspiration pour approfondir des aspects sur lesquels nous croyons que tout est dit et écrit. Pour en savoir davantage, consulter la table des matières et feuilleter l’ouvrage sur le site de Septentrion.

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