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Continuité, le magazine du patrimoine au Québec Patrimoine immatériel : la vie qui bat

Continuité, le magazine du patrimoine au Québec
Patrimoine immatériel : la vie qui bat

 

par Gilles Durand

 

Patrimoine immatériel : continuité

Magazine Continuité, no 127,
hiver 2010-2011

Crédit : Continuité

Le patrimoine immatériel préoccupe de plus en plus les Québécois. Le ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine l’a inclus dans le projet de loi 82 sur le patrimoine culturel. Dans son avant-dernier numéro (127, hiver 2010-2011), le magazine Continuité apporte également sa contribution pour donner de la visibilité à l’importance de le faire connaître, de le mettre en valeur et de le transmettre aux générations futures. Plus d’une institution se consacre à la mise en valeur du patrimoine immatériel, le creuset de notre identité collective, et nous invite à faire un détour pour les visiter.

 

Le patrimoine immatériel en regard du patrimoine naturel et matériel

Le patrimoine se présente sous différentes formes. Il peut être naturel, par exemple un espace découpé en bandes allongées et étroites pour répondre aux exigences du régime seigneurial. Il peut tomber dans la catégorie qui nous est la plus familière, le patrimoine matériel, un bâtiment, des vestiges archéologiques, un objet muséologique, une plaque, un monument pour rappeler un personnage ou un événement marquant. Mais il peut aller aussi au-delà du concret, être de nature immatérielle, tels « les traditions et expressions orales, la langue, la musique, la danse, le conte, les pratiques sociales, les rituels et les événements festifs ainsi que … les savoir-faire liés à l’artisanat traditionnel (Continuité, no 127, p. 20) ». C’est un patrimoine vivant, porté par des membres de la communauté à l’intérieur de laquelle il se transmet de génération en génération. Il est indissociable du patrimoine matériel, car il permet de le mettre en contexte, de l’expliquer et d’en retracer les origines, aussi loin que dans l’Hexagone. Il contribue également à la conservation du patrimoine matériel, par exemple dans le cas d’un bâtiment patrimonial détérioré, le savoir-faire d’un artisan qui connaît les techniques et les méthodes de construction de l’époque pour lui redonner son état original.

 

Un patrimoine à identifier, à documenter et à faire connaître

Le patrimoine immatériel est vivant; il fait partie de « la vie qui bat (Ibid., p. 19 » comme l’indique en sous-titre le magazine. De façon à ce qu’il puisse se conserver et se transmettre, ce type de patrimoine exige d’identifier le porteur, détenteur de l’information relative à celui-ci, de façon à illustrer un savoir-faire ou une coutume et à en préciser les exigences de l’apprentissage et de la transmission. Prenons le cas d’une ceinture fléchée : l’objet matériel, c’est la ceinture, par contre le geste posé par l’artisan et l’explication qu’il en donne, forment le patrimoine immatériel. Dans ce champ de notre héritage où se cristallise note identité, Laurier Turgeon1, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en patrimoine ethnologique de l’Université Laval, mène à l’heure actuelle deux projets d’inventaire rendus accessibles en ligne par le biais d’Internet : l’Inventaire des ressources ethnologiques du patrimoine immatériel (IREPI) et l’Inventaire du patrimoine immatériel religieux du Québec. Ces inventaires sont riches de renseignements sur l’origine de nos façons de faire, par exemple le savoir-faire lié à la confection d’un matelas de laine importé de France ou bien encore, depuis 1723, la fabrication des petits pains de la Sainte-Geneviève par les bénévoles de l’église Notre-Dame-des-Victoires de la ville de Québec.

 

Les chemins de notre mémoire immatérielle commune : patrimoine et tourisme culturel

À l’heure actuelle, les touristes ne recherchent plus seulement des bâtiments et des objets muséologiques. Ils sont aussi friands d’ajouter au plaisir d’une découverte sur le terrain celui de se retremper dans l’atmosphère, les goûts et les pratiques d’une autre époque. Les chemins de la mémoire immatérielle franco-québécoise empruntent plusieurs détours : un site d’interprétation historique comme celui du parc du Vieux-Moulin de Pointe-aux-Trembles qui allie un symbole de la meunerie, le moulin construit par les Sulpiciens en 1719, et la communication du savoir-faire et du quotidien du meunier à l’époque; un musée qui présente une exposition sur les contes et légendes, entremêlant tableaux et conférences dont leur origine du Vieux Continent2; une maison ancestrale qui se démarque, comme la Maison Saint-Gabriel, offrant aux artisans l’opportunité de démontrer aux visiteurs leur savoir-faire, telle la fabrication d’un tonneau par le tonnelier; un festival de contes et légendes comme il s’en rencontre dans les différentes régions du Québec; une fête rassembleuse, telles les Fêtes de la Nouvelle-France dans les quartiers historiques de Québec du 3 au 7 août 2011, ou bien encore restreinte plutôt aux familles, tel Noël célébré en famille au Québec depuis 400 ans; plus simplement, l’atelier ou le lieu de travail du praticien d’un métier artisanal comme le cordonnier, le forgeron, le tailleur de pierre ou le maçon.

 

Le défi du patrimoine immatériel : une préoccupation de la CFQLMC

La Commission franco-québécoise sur les lieux de mémoire communs (CFQLMC) partage les préoccupations des tenants du patrimoine immatériel. Elle a confié la direction de l’un des projets nés à son initiative, l’Encyclopédie du patrimoine culturel de l’Amérique française à Laurier Turgeon, professeur-chercheur à l’Université Laval mentionné ci-dessus. L’ouvrage accessible en ligne se veut le bilan de l’héritage apporté par Champlain et réalisé par ses descendants en Amérique du Nord, en accordant une attention particulière au processus de mise en valeur du patrimoine et à la dimension immatérielle de celui-ci.

 

 

Sources :

  1. Laurier Turgeon est coauteur – avec Jocelyn Gadbois – du texte paru dans le magazine Continuité no 127 sous le titre « Visiter l’âme d’un pays », p. 36- 40.
  2. Voir Jean-Claude Dupont, « Contribution des légendes à la mémoire franco-québécoise » dans Mémoires vives, no 30, juin 2010
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