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Le sociologue Alexis de Tocqueville : de la mémoire savante à la mémoire collective

Le sociologue Alexis de Tocqueville : de la mémoire savante à la mémoire collective

 

par Gilles Durand

 

Alexis Tocqueville

Source : http://classiques.uqac.ca

Le 13 septembre 2007, Simon Langlois, professeur titulaire au Département de sociologie de l’Université Laval, était l’invité de Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ) pour prononcer une conférence sur le sociologue Alexis de Tocqueville. L’année 2005 marque le 200e anniversaire de la naissance de ce dernier qui connaît un purgatoire plus ou moins long selon les pays, malgré ses écrits sur la supériorité de la démocratie face à l’ordre ancien fondé sur les privilèges de classe. Aux États-Unis, il est pleinement reconnu dès le début du 20e siècle. La France, sa propre patrie, ne le redécouvre vraiment que récemment; en 2005, les Célébrations nationales lui consacrent un nouveau site. Au Québec, le bicentenaire de sa naissance est passé inaperçu. Pourquoi?

 

 

 

 

 

 

 

Pourquoi Tocqueville n’est-il pas encore entré dans la mémoire collective du Québec?

La conférence du professeur Langlois suggère plusieurs explications :

  • Alexis de Tocqueville est un Français, né et décédé en France. Par contre, originaire d’une grande famille aristocratique française, il est démocrate de raison tout en demeurant aristocrate de cœur . Il reste attaché aux privilèges hérités de l’ordre ancien;
  • Alors qu’il n’a que 26 ans, Alexis de Tocqueville vient aux États-Unis pour étudier le système carcéral américain, mais, officieusement, peut-être davantage pour regarder de près les institutions démocratiques et le système fédéral de la nouvelle république. Il demeure aux États-Unis dix mois, soit du 9 mai 1831 au 20 février 1832, incluant un déplacement de deux semaines en territoire canadien. Ce voyage outre-frontière, à l’été 1831, non prévu au point de départ, l’amène du Sault-Sainte-Marie, dans les Grands Lacs, à Montmagny, sur la rive sud du Saint-Laurent;
  • Malgré le court laps de temps en territoire canadien, Alexis de Tocqueville décrit avec beaucoup d’acuité la situation : une population canadienne, encore française de langue et de cœur, se mêlant très peu aux Anglais; une administration coloniale britannique dont les Canadiens se méfient; une classe de marchands et de professionnels canadiens anglophiles, alliés à leurs homologues anglais pour lutter un gouvernement trop centralisateur; par contraste, le groupe des curés maintenant la cohésion des Canadiens autour de la paroisse et leur attachement à la langue et à la religion héritées de France; l’absence de leader pour rassembler les Canadiens sous un même drapeau, qui fait en sorte que Tocqueville n’a pas de réponse claire sur leur devenir – Tocqueville connaît Papineau à Paris en 1839 seulement –. Il faut aussi noter que les observations de Tocqueville sur le Bas-Canada, quelle que soit la clairvoyance dont elles font preuve, sont consignées dans ses lettres à ses proches et dans ses carnets de notes de terrain et qu’elles n’ont pas été publiées;
  • Alexis de Tocqueville voit, dans la méfiance des Canadiens à l’endroit du gouvernement, l’effet néfaste de la politique centralisatrice de l’administration coloniale française. L’administration britannique qui a suivi y est aussi pour quelque chose. Malheureusement, il n’a jamais proposé une analyse complète de cette question dans ses ouvrages publiés.

La conférence donnée par le professeur Simon Langlois constitue un apport important pour l’entrée d’Alexis de Tocqueville dans la mémoire collective. Elle contribue à l’enrichissement de nos lieux de mémoire.

Webographie

Les lecteurs intéressés peuvent consulter avec profit les ressources du Web suivantes :

  • Simon LANGLOIS, « Alexis de Tocqueville : un sociologue au Bas-Canada ». Un article publié dans la revue The Tocqueville Review/La revue Tocqueville, Numéro spécial Alexis de Tocqueville (1805-1859)/A Special Bicentennial Issue, vol. XXVII, no 2, 2006, pp. 553-574 .
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